Etude de cas : “Biodiversité”

L’étude de cas menée sur le champ de la biodiversité a pour but de répondre à la problématique suivante :
En quoi la stratégie de conduite du changement contribue-t-elle à la préservation/restauration de la biodiversité du territoire ?

Note préliminaire : cette étude de cas s’appuie sur une analyse documentaire et sur une douzaine d’entretiens avec les parties prenantes (voir les documents utilisés et la liste des entretiens réalisés en annexe).

L’intervention de la commune sur la thématique de la biodiversité

Historique de l’intervention

Dès 1995, Jean-François Caron, le maire actuel de la commune alors adjoint à l’urbanisme et à l’environnement, “gèle” des parcelles dans la perspective de créer une ceinture verte pour favoriser la biodiversité et les déplacements doux[1]. Le Plan d’Occupation des Sols (POS), signé en 2000, permet ensuite de fixer plusieurs orientations relatives au développement durable, et notamment de réserver des lots pour acquérir le foncier indispensable à la création de liaisons vertes. Ces dispositions permettent, quelques années plus tard, la création de la ceinture verte, d’une quinzaine de kilomètres, par la requalification des anciens cavaliers miniers.

En 2000, la commune définit son “Plan vert”, partie environnementale de la Charte du Cadre de vie, avec notamment 4 axes stratégiques relatifs à la préservation de la biodiversité[2] :

Dès le début des années 2000, la commune s’engage dans la gestion différenciée des espaces et l’utilisation de méthodes alternatives aux pesticides. Elle est ainsi une des premières communes en France à s’engager dans une démarche “zéro phyto”(#innovation)(Troisieme_fleur.pdf).

Elle définit, en 2006, un Plan biodiversité destiné à mieux connaitre la faune et la flore du territoire et en 2007, un plan de désherbage est mis en place.

(Le Plan Biodiversité) comprend des opérations spécifiques comme le baguage et le radiopistage d’oiseaux, ainsi que le suivi spécifique des hirondelles, mais aussi depuis 2008 un inventaire faune-flore détaillé. (Site internet de la commune, page “Environnement-Biodiversité”)

Depuis 2008, la commune s’engage également en faveur de l’agriculture biologique, avec notamment 13 hectares dédiés aux agriculteurs conventionnels souhaitant opérer une reconversion (A3) [3]).

La commune améliore depuis progressivement ses pratiques dans la gestion des espaces et la réduction de l’utilisation de produits phytosanitaires. En 2012, elle signe la charte de l’agence de l’eau au niveau 4 (gestion différenciée), puis, en 2014 au niveau 5 (zéro phyto)[4].

Depuis 2013, les déchets verts issus de l’entretien de la commune sont ainsi récupérés par les agriculteurs convertis à l’agriculture biologique (B1.pdf).

Objectifs

Les objectifs de la commune en matière de biodiversité semblent être restés les mêmes que ceux définis lors du Plan vert (B1.pdf, B2.pdf, B3.pdf, LG_Ville_Pilote.pdf).À terme, l’objectif, pour les services techniques, est d’arriver à homogénéiser leurs pratiques sur l’ensemble du territoire communal (B3.pdf).

Grâce à son Plan vert, partie environnementale de la Charte du Cadre de vie signée en 2000, la commune a augmenté les qualités écologiques des espaces existants (plantation d’espèces régionales, application de la gestion différenciée…), créé de nouveaux espaces naturels (bosquets, haies, zones humides…) et relié les espaces entre eux (corridors biologiques) tout en favorisant les initiatives des particuliers (jardins, façades…) et les déplacements doux (de quartier à quartier ou vers les équipements publics). Une dynamique toujours d’actualité, la commune saisissant toutes les occasions qui se présentent à elle pour améliorer son dispositif. (LG_Ville_Pilote.pdf)

L’objectif est également que la préservation de la biodiversité puisse participer à l’amélioration du cadre de vie et du “bien vivre ensemble”(#multicritère)(LG_Ville_Pilote.pdf).

À Loos-en-Gohelle, la dimension environnementale est fortement présente (…) Outre les enjeux liés à l’eau, à l’énergie et aux pollutions (des sols ou de l’air, etc.) et à la survie de l’écosystème (donc de l’Homme), les espaces naturels favorisent les activités de plein air, constituent des lieux de rencontre et de partage, améliorant ainsi la vie sociale des habitants et leur procurant du bien-être. Ainsi, l’environnement contribue au développement du “bien vivre ensemble”. (LG_Ville_Pilote.pdf)

Ressources

Le budget de fonctionnement des espaces verts de la commune est de 123 750 €, et le budget d’investissement de 73 000 € (soit respectivement 1,7% et 2,3 % du budget global de fonctionnement et d’investissement de la commune).

Un élu et un agent, le directeur des services techniques, sont référents “Biodiversité”. Les principales ressources humaines allouées sur la thématique sont celles des services techniques.

À Loos-en-Gohelle, les services techniques (environ 80 personnes (dont 30 dédiés aux espaces naturels)) sont une pierre angulaire de l’application au quotidien de la politique de développement durable. En effet, ils sont en charge de l’entretien des bâtiments et espaces extérieurs, des divers équipements et de la voirie, mais aussi de l’aspect technique et logistique des temps forts municipaux (…). (Site internet de la commune, page “Environnement-Biodiversité”)

La commune a également recours à des ressources externes (#expertise) parmi lesquelles le Centre Permanent d’Initiatives pour l’Environnement (CPIE) Chaîne des Terrils pour les actions de sensibilisation des habitants, de formation des agents ou la définition de son Plan Biodiversité. La Fédération Nationale de Lutte contre les Organismes Nuisibles (Fredon) a, quant à elle, appuyé la commune dans la réalisation de son plan de désherbage et de gestion différenciée des espaces. Elle a également participé à la formation des agents sur la thématique. Enfin, un paysagiste a également accompagné la commune dans l’analyse des sites et les premières orientations des Espaces Publics de Proximité (EPP)(Extrait_etude_EPP.pdf)[5]).

Modalités d’intervention

Les modalités d’intervention de la commune sont également principalement axées sur les orientations du Plan vert et leurs évolution :

Les actions de sensibilisation sont en grande partie déléguées au CPIE, néanmoins la commune communique sur la thématique à travers ses différents outils comme l’Écho loossois, le flash infos ou les voeux du maire.

On peut également articuler l’intervention de la commune aux marqueurs suivants, caractéristiques de la stratégie de conduite du changement loossoise :

Changement de posture des acteurs du territoire

Les changements observés

Des habitants avec une vision positive du territoire

Les habitants ayant participé à l’opération Cœur de Loos ont une vision positive du territoire et de ses perspectives. Ils considèrent que c’est un territoire en évolution, tourné vers l’avenir (B10.pdf, B11.pdf), actif (B11.pdf, B12.pdf), attractif (B11.pdf, B12.pdf), agréable (B12.pdf, B14.pdf) et où le patrimoine minier est mis en valeur (B13.pdf).

De manière plus générale, les habitants semblent apprécier l’amélioration du cadre de vie, ou mieux le percevoir (C15.pdf, B7.pdf, B9.pdf). Ils s’approprient également progressivement certains espaces, comme le terril du 11/19 ou la ceinture verte (B2.pdf, B3.pdf, C15.pdf).

Maintenant, le terril est devenu un lieu approprié par la population (…)Cela fait partie de leur jardin et la biodiversité associée en fait partie également. (B2.pdf)

Des habitants, agents et élus qui adhèrent à la démarche

Les habitants ayant participé au projet Cœur de Loos semblent également adhérer à la démarche de développement durable et à l’action de la commune (B10.pdf, B11.pdf, B12.pdf, B13.pdf, B14.pdf), notamment en matière de biodiversité (B10.pdf) et d’énergie (B12.pdf). Ils ont également une vision positive de ses élus et agents (B10.pdf, B11.pdf, B12.pdf, B13.pdf, B14.pdf).

Si les habitants adhèrent globalement à la démarche, il semble exister une ou plusieurs centaines de personnes particulièrement convaincues (B2.pdf).

Autour de la mairie et des équipes municipales, il y a le “cœur” de Loos, quelques centaines d’habitants qui suivent de prêt ce que l’on fait à chaque fois. Les autres, sans sondage, c’est dur d’avoir un avis. Il y en a une centaine qui sont bien investis et au courant de ce qui se passe à Loos et, globalement, tout le monde y accroche (B2.pdf).

La gestion différenciée des espaces, qui conserve certains espaces dans un état proche d’un état naturel (par exemple les prairies fleuries), est progressivement acceptée par la population (B1.pdf, B2.pdf, B3.pdf, B4.pdf) même si certains habitants y sont encore peu favorables (B2.pdf, B3.pdf, B4.pdf, B7.pdf).

Ils peuvent dire : « Pourquoi vous ne coupez pas (les prairies fleuries) ? ». Mais petit à petit, même si c’est difficile d’avoir l’avis global, ils sont d’accord avec (la démarche). Les habitants sont d’accord avec le travail que font les services techniques. (B2.pdf)

Ça ne marche pas la biodiversité, ça fait dégueulasse. On vient d’appeler les pompiers pour un nid de guêpes. On est envahis de guêpes, enfin d’abeilles c’est pareil. Ça fait sale. C’est tondu une fois par an, beaucoup se plaignent (P13.pdf). [6])

La plupart des agents semblent progressivement convaincus par la démarche (B1.pdf, B2.pdf, B3.pdf, B4.pdf), même si certains de “l’ancienne génération” semblent plus réticents sur les pratiques à mettre en oeuvre (B1.pdf, B3.pdf, B4.pdf). Le projet de la commune est attractif pour certains agents qualifiés qui ont intégré les services de Loos-en-Gohelle par intérêt pour celui-ci (B1.pdf).

Les élus semblent également convaincus par la démarche globale de la commune, même si certains sont qualifiés de “suiveurs”.

Pour les élus, l’adjoint avant moi, c’était une personne plus âgée, pas dans la culture développement durable. Il a arrêté maintenant. J’étais étonné de la façon dont il me parlait, j’avais l’impression d’avoir à faire à un convaincu, alors que je suis sûr que ce n’était pas sa tasse de thé avant. Aujourd’hui, dans le conseil municipal, il y a une grande partie de convaincus, même s’il y en a pas mal qui suivent et je ne suis pas sûr que s’ils étaient dans l’autonomie totale ils seraient convaincus. (B2.pdf).

Les agriculteurs et chasseurs adhèrent également, en partie, progressivement à la démarche de la commune (B1.pdf, B3.pdf).

Les relations deviennent de plus en plus intéressantes (…)Les agriculteurs étaient sceptiques au départ. Il y en a toujours une partie qui est sceptique et une partie qui est passée au bio. (B1.pdf).

Des relations de confiance qui s’installent

Il semble exister une bonne interconnaissance entre les habitants (B10.pdf, B12.pdf), notamment au travers du milieu associatif investi sur la thématique de la biodiversité (B11.pdf, B12.pdf). Ces derniers s’apprécient mutuellement (B9.pdf, B11.pdf).

C’est sympa, agréable, car les gens se connaissent et se parlent. (B12.pdf)

Les habitants et le CPIE semblent également avoir noué une relation de confiance avec la commune (C15.pdf, B10.pdf, B12.pdf, B13.pdf), ses services (B1.pdf, B3.pdf, B4.pdf, C15.pdf, B9.pdf, B10.pdf) et ses élus (C15.pdf, B13.pdf).

Pour les associations de jardins partagés, la situation est plus hétérogène. Si l’une des associations semble avoir tissé des liens de proximité avec la mairie et les habitants (B9.pdf, B3.pdf), cela ne semble pas être le cas d’une autre association présente sur le territoire (B8.pdf).

Les services techniques ont également acquis progressivement une relation de confiance avec les agriculteurs (B1.pdf, B3.pdf).

Les compétences et savoir-être

Les participants au projet Coeur de Loos, comme les adhérents du jardin partagé en lien avec la commune, semblent avoir des savoir-être coopératifs, pour la plupart acquis de longue date (B9.pdf, B11.pdf, B10.pdf, B13.pdf). Certains se sentent même en progression sur ce point (B10.pdf, B12.pdf).

Un participant au projet Coeur de Loos, au contraire, affirme qu’il n’a pas de compétences dans ce domaine, et que c’est également le cas d’autres participants (B14.pdf).

(Ce participant) s’est imposé. Il n’a pas écouté. (B14.pdf)

Les agents des services techniques ont également des savoirs-être coopératifs (B3.pdf), que certains affichent comme une conviction (B1.pdf).
Ils ont également aussi des savoir-faire techniques sur leurs pratiques (B1.pdf, B3.pdf, B4.pdf)

De manière générale, les habitants de la commune semblent plus sensibles ou ont acquis des connaissances sur la thématique de la biodiversité (B3.pdf, B4.pdf, B6.pdf, B7.pdf, B10.pdf, LG_Ville_Pilote.pdf). C’est aussi le cas de certains des habitants engagés sur Cœur de Loos (B10.pdf, B11.pdf, B14.pdf).

Les indices de contribution de la stratégie de conduite du changement

Faire et donner à voir

C’est notamment les actions entreprises par la commune, et leurs effets, qui permettent aux différents acteurs d’avoir une représentation positive du territoire, de la commune et d’adhérer à sa démarche (B9.pdf, B10.pdf, B11.pdf, B13.pdf, B14.pdf).

J’ai pu voir ce qui est fait partout, à la ceinture verte, aux terrils, c’est vraiment bien (…) quand on fait des mares, que l’on plante des arbres, on remet en place la biodiversité. C’est des choses comme ça qui m’ont marqué. (B10.pdf)

Les actions de la commune, comme la gestion différenciée des espaces ou la ceinture verte, permettent également de sensibiliser les habitants à la biodiversité avec un aspect vitrine et un dialogue de terrain avec les agents (B2.pdf, B4.pdf).

C’est petit à petit, car il a fallu communiquer. Les pratiques que l’on met en place sont visibles. Il a fallu faire œuvre de pédagogie pour expliquer ce que font nos agents sur le terrain. (B2.pdf)

Les agents ont notamment acquis de nouvelles connaissances sur les méthodes de gestion des espaces par la pratique (B3.pdf). Certains ont également pu adhérer aux nouvelles pratiques, ou venir travailler à Loos-en-Gohelle, du fait de sa visibilité de la démarche et de son caractère innovant (B1.pdf).

On parle de (cet agent), on parle de Loos-en-Gohelle qui est très souvent représenté à la TV. Je pense qu’il y retrouve de la notoriété. Dans un petit salon avec les responsables Espace vert, il est connu. Il est maintenant complètement ouvert à cette philosophie. Ce qui n’était pas le cas il y a 6 ans. (B1.pdf)

Les actions d’information et de sensibilisation

Si les habitants ont acquis des connaissances sur la thématique, c’est aussi en partie grâce aux multiples actions de sensibilisation menées par la mairie (B1.pdf, B2.pdf, B3.pdf, B10.pdf), et notamment les voeux du maire (B2.pdf, B3.pdf) ou l’Écho loossois (B10.pdf).

La communication, c’est plus de 50% de la réussite (pour la connaissance des habitants sur la biodiversité). (B3.pdf)

L’implication des acteurs

C’est également car la commune implique ses habitants que certains d’entre eux ont une représentation positive de son action (B10.pdf) ou de ses services avec qui ils peuvent collaborer (B10.pdf, B12.pdf). La répétition de ces actions permet à certains de perfectionner leurs savoir-être collaboratifs (B12.pdf).

L’implication des habitants dans les différents projets leur permet aussi d’acquérir des connaissances sur la thématique (B1.pdf, B4.pdf, LG_Ville_Pilote.pdf), comme c’est le cas sur le projet Coeur de Loos (B10.pdf, B11.pdf).

On a mis des fleurs et on essaye de recréer un respect de tout. Elles ont une fonction, avant je ne le savais pas et je l’ai découvert avec toutes ces réunions (B10.pdf).

C’est également cette implication qui leur a permis de se ré-approprier les anciens sites miniers comme le terril du 11/19(((B2), C15.pdf).

Maintenant, le terril est devenu un lieu approprié par la population. Là, c’est encore la méthode loossoise, on y a fait tellement d’évènements. (B2.pdf)

L’implication progressive des agriculteurs et des chasseurs dans la démarche permet de créer des liens avec les services techniques. (B3.pdf)

Le recours à l’expertise du CPIE

L’association du CPIE à l’intervention de la commune permet d’avoir recours à une expertise reconnue en animation et sensibilisation de la population (B1.pdf, B2.pdf, Recit_2014.pdf).

Le CPIE, c’est l’association idéale pour travailler sur la biodiversité. Ils savent faire de l’animation, ils sont spécialisés. (B1.pdf)

Il a également permis, avec la Fredon, de réaliser avec succès les premières formations sur la thématique pour les agents (B1.pdf, B2.pdf).

Le CPIE a travaillé avec la ville de Loos-en-Gohelle sur la formation des agents avec, vers les années 2000, une initiation du personnel sur la biodiversité, sur les pratiques. C’est une formation qui a très bien fonctionné. (B2.pdf)

Le recrutement et la formation des agents

Ce sont les formations mises en place, notamment avec l’aide du CPIE, qui ont permis aux agents d’acquérir les savoir-faire nécessaires aux nouvelles pratiques et d’adhérer à la démarche (B2.pdf, B3.pdf, B4.pdf).

Il y a bien sur des consignes données, mais il y a aussi eu la formation. On a essayé de les convaincre. Bien sûr, il y a des décisions, mais c’est en même temps qu’une formation, un essai. C’est à mon sens ce qui les a convaincus, c’est la pratique, et l’accompagnement par le CPIE en montrant que l’on pouvait faire aussi bien (B2.pdf).

(Entre le moment où j’avais de l’appréhension et celui où j’ai été convaincu), il y a eu la formation à Grande-Synthe. J’ai vu des choses déjà réalisées qui m’ont convaincu. (B3.pdf)

Le responsable des services techniques, également référent biodiversité, a notamment été recruté (2009) car il était sensible à la thématique (B1.pdf). Celui-ci semble avoir joué, ensuite, un rôle non négligeable dans la conviction des autres agents (B1.pdf, B4.pdf).

(Le directeur des services techniques) a fait le nécessaire et a réussi à convaincre, à faire changer les mentalités. Moi, il m’a fait découvrir le métier, donc c’était facile de convaincre. Pour les autres, c’était des entretiens individuels. (B4.pdf)

Enfin, si les agents des services techniques ne semblent pas être directement touchés par les processus collaboratifs en interne actuellement, ils semblent néanmoins qu’un rapport cadre-agent coopératif facilite la conviction de ces derniers (B1.pdf).

Nous ne sommes pas du tout dans le rapport cadre-agent, nous sommes plus dans le coopératif. Le but, c’est d’arriver à ce qu’ils soient convaincus que ça marche. (B1.pdf)

Une action de long terme qui s’appuie sur un discours convaincant

Le changement de posture des acteurs peut être facilité par l’implication de long terme de la commune sur la thématique (B1.pdf, B4.pdf, B7.pdf)ou dans ses pratiques d’implication habitante (B10.pdf). Ce serait notamment le cas pour la sensibilisation des habitants à la thématique, notamment via le discours du Maire (B1.pdf, B4.pdf, B7.pdf, B10.pdf, B12.pdf), mais aussi pour la connaissance et la conviction des agents qui ont progressivement pu faire “des essais” et s’adapter aux nouvelles pratiques (B2.pdf).

Jean-François Caron (…) m’avait complètement convaincu avec ses idées. (B10.pdf)

Je pense que le maire à raison, je l’accompagne comme fonctionnaire, habitant, et militant. (B1.pdf)

Les autres explications

Un environnement favorable aux changements de posture sur la biodiversité

Il existe un environnement favorable à la sensibilisation des agents et des habitants à la biodiversité, avec notamment :

J’étais sensible à l’écologie en général, sans avoir un profil extrémiste. Par le biais de mon métier, on reçoit des représentants, on va en conférence, en formation. On sait que l’on doit arrêter de polluer notre terre, une grande partie des jardiniers sont plus sensibles à cela. (B1.pdf)

Avec tout ce que l’on entend à la télé, on sait que ça nous concerne. (B4.pdf)

Les multiples “casquettes” du directeur des services techniques

Le directeur des services techniques a de multiples casquettes qu’il peut mettre au service de la sensibilisation ou de l’implication des différents acteurs. Celui-ci est président de la société de chasse, et a ainsi des relations privilégiées avec les chasseurs et agriculteurs.

J’ai des relations avec eux, car je suis un interlocuteur privilégié. Je suis notamment président de la société de chasse, donc j’ai une relation avec eux par le biais de la chasse et de mon métier. (…) Les relations deviennent de plus en plus intéressantes, de par tout mon travail fait au niveau relationnel, de par mon poste à Loos-en-Gohelle et de Président de la société de chasse (…) Dans une réunion de chasse ou avant la chasse, c’est toujours pour moi un moyen sympathique de faire passer un message.

Le Maire, une personnalité convaincante

Si les acteurs du territoire adhèrent en effet à la démarche proposée par la commune, c’est fréquemment la personne du maire qui motive fortement leur adhésion (B1.pdf, B4.pdf, C15.pdf, B9.pdf, B10.pdf, B13.pdf).

Jean-François Caron m’a complètement convaincu avec ses idées. (B10.pdf)

Il a également un rôle d’exemple auprès de certains agents, par exemple sur l’implication habitante.

(Ma conviction sur la nécessité d’impliquer les habitants ?), c’est le contact de monsieur le maire. Il respecte sa population et donne envie de faire la même chose (B1.pdf).

Les facteurs historiques

Plusieurs facteurs historiques peuvent également expliquer en partie le changement de posture des acteurs sur le territoire :

Marcel Caron avait engagé des actions sur le terril, il y avait déjà une volonté il y a 25 ans (B7.pdf).

Pour tous les fils de mineurs, c’est obligatoire d’entretenir son jardin sans produits. (B8.pdf)

De plus, l’inscription du bassin minier au patrimoine mondial de l’Unesco a également contribué à la vision positive du territoire par certains habitants (B13.pdf).

(À la fin de l’entretien, l’habitant sort spontanément le livret Unesco. C’est une fierté pour vous ?)Oh oui. (B13.pdf)

Les multiples sphères d’acquisition des savoir-être coopératifs

Une grande partie des habitants ayant participé au projet Coeur de Loos avaient déjà des savoirs-être coopératifs (B10.pdf, B11.pdf, B12.pdf, B14.pdf) en tant que membre d’une association (B10.pdf, B12.pdf), ancien élu (B10.pdf, B14.pdf) ou tout simplement car, selon eux, cela fait partie de leur nature (B11.pdf). Certains affirment également que ces valeurs correspondent à l’identité minière dont ils se revendiquent (B9.pdf)

Je suis un ancien élu, donc j’ai eu plus l’occasion de pratiquer. (B10.pdf)

J’aime bien participer. C’est dans ma nature. (B11.pdf)

C’est notre caractère, notre éducation minière. Dans les cités minières, il fallait se serrer les coudes. (B9.pdf)

Les convictions personnelles des agents

Certains agents des services techniques, et notamment le directeur, témoignent également de convictions personnelles sur la thématique de la biodiversité, indépendamment de leur fonction à la ville de Loos.

Je suis aussi un peu “écolo”, et ma femme aussi. (B4.pdf)

Les autres facteurs

Sur le territoire, le manque de ressources de certains habitants peut les conduire à considérer la biodiversité comme un sujet mineur (B2.pdf, C15.pdf).

Nous avions 2 animateurs qui allaient à la rencontre des locataires sur les sites. On leur disait : « cette opération est payée par un tel et c’est pour la biodiversité dans votre jardin ». Un des habitants leur a répondu : « Moi, j’ai ma cuvette des toilettes qui est cassée donc j’ai d’autres priorités ». Il y a encore beaucoup de générations qui vivent aux dépens d’un ayant droit lié aux mines. Il y a encore des difficultés économiques, des gens qui ont du mal à finir les fins de mois. (C15.pdf)

Certaines positions extrêmes, ou des prises de position contre l’étiquette politique du maire de la ville, peuvent freiner l’adhésion au projet de territoire (B1.pdf).

Car c’est pareil, (parmi les chasseurs) y a des extrémistes, des anti-écolos, des partisans du FN (…). (B1.pdf)

Enfin, certaines associations peuvent ne pas engager de relations avec la mairie pour des motifs personnels de leurs dirigeants ou par méfiance envers les autres habitants (vols, dégradation). (B8.pdf)

Co-construction d’une action publique plus pertinente

Les changements observés

Des habitants sollicités de manière ponctuelle sur la thématique

Les habitants sont associés de façon ponctuelle à la co-construction des actions de la commune sur la biodiversité (B2.pdf, B7.pdf). Cela a notamment été le cas lors de la définition du Plan biodiversité en 2006(B7.pdf). Néanmoins, depuis, peu d’actions de co-construction de l’action publique ont été menées spécifiquement sur la thématique. Une réflexion est toutefois prévue en 2016 sur la gestion des terrils (B2.pdf, B7.pdf).

La commune implique cependant fortement les habitants dans la création des Espaces Publics de Proximité (EPP)[7] dans les différents quartiers de la ville, dont le projet Coeur de Loos[8].

On à 15 EPP à faire. On les a identifiés avec un (paysagiste), il y a 2 ans. L’idée, c’est de retravailler un espace vert dans chaque quartier en impliquant la population et en incorporant un lieu de rencontre, avec des jeux d’enfants, des arbres fruitiers… C’est refaire un lieu de vie, tout en associant la population. (B3.pdf)

Ces aménagements ont notamment pour but de créer des espaces de qualité, agréables, et accessibles à tous, afin de favoriser le lien social et la convivialité dans les différents quartiers”[9] mais ce sont notamment “aussi des lieux privilégiés de l’interprétation du territoire communal, notamment en matière de gestion écologique des espaces”[10].

Il ne s’agit pas à chaque fois d’un seul élément supplémentaire. On va regarder comment on va circuler, comment sont les usages et ensuite la biodiversité. (B2.pdf)

Une co-construction partielle sur le projet « Coeur de Loos »

Début 2015, une quinzaine d’habitants environ ont participé à la première réunion de présentation du projet (B13.pdf) animée par les 2 référents (directeur des services techniques et élu) et le responsable des espaces verts. Celle-ci avait notamment pour but d’identifier les volontaires pour participer à la définition du projet d’aménagement.

Ensuite, 3 ateliers de travail ont eu lieu au centre des services techniques afin de définir les modalités de réalisation du projet (emplacement des bacs, choix des arbres fruitiers…) avec les 5 à 6 participants volontaires, tous habitants ou membres d’association de jardinage écologique de la commune (3A et Biaux gardins)(CR_atelier1.pdf,CR_atelier2.pdf, CR_atelier3.pdf). Ces participants sont surtout des personnes âgées (B11.pdf, B14.pdf)et des jardiniers passionnés (B14.pdf).

Plusieurs participants ont apprécié l’animation des ateliers réalisée par le directeur des services techniques (B10.pdf, B11.pdf). Néanmoins, l’un d’entre eux regrette que “plus de professionnels” n’aient pas été mobilisés pour guider les habitants et la définition du projet (B14.pdf).

À la première réunion, il a très bien fait ça sur écran, ça donne des idées. A la deuxième réunion, le responsable des espaces verts avait collé des petits bouts de papier pour savoir où l’on mettrait les bacs, c’était bien (…) Je crois qu’ils ont été en capacité de faire fructifier le débat. Ils sont tous les deux à la hauteur. (B11.pdf)

La majorité des participants a eu l’impression de pouvoir s’exprimer lors des différents ateliers (B9.pdf, B10.pdf, B11.pdf, B13.pdf, B14.pdf), où “beaucoup d’échanges ont eu lieu”(B13.pdf). Les membres des associations de jardinage écologique ont notamment pu apporter leur expertise thématique (B9.pdf).

Il y en a qui ont dit s’il faudrait des bacs ou des chemins. Moi, j’ai dit qu’il faudrait une table de pique-nique pour s’asseoir, ou pour des ouvriers qui veulent manger. (B11.pdf)

Néanmoins, une personne estime que l’un des habitants, fortement impliqué dans le projet n’était pas en capacité d’écouter les opinions des autres (B14.pdf).

Les services techniques quant à eux, précisent qu’ils doivent avoir un espace suffisant pour pouvoir manier le matériel d’entretien (B11.pdf).

Certaines des décisions d’aménagement ont été prises de manière collective et partagée (((B11)), comme par exemple le choix de mettre des arrosoirs au lieu d’un tuyau pour favoriser les liens entre les habitants (B11.pdf).

Tout le monde parle. Par exemple, (un habitant) disait qu’il fallait des arrosoirs. (Puis on s’est dit) qu’il faudrait un tuyau, mais ce serait plus le même impact. On se retrouve à 3 ou 4 pour arroser, c’est plus sympa. C’était positif. On a réussi à se mettre d’accord. (B11.pdf)

Mais d’autres décisions retenues sont restées incomprises par certains habitants :

Mon point de vue, cela a toujours été qu’il y avait trop de bacs pour l’alimentation. Les autres voulaient plus de bacs, notamment les services techniques et d’autres habitants. Mais comme ils étaient plus nombreux…(B13.pdf)

Ce n’est pas mon projet, je souhaitais quelque chose d’intimiste et je ne l’ai pas eu. (B14.pdf)

Si le plan défini collectivement représente bien la décision d’aménagement du projet (((B11)), certains habitants regrettent que certains points ne soient pas (encore?) traduits dans les aménagements (B11.pdf).

C’est bien, mais la plantation n’est pas identique aux bacs prévus (B11.pdf).

Les usages ne se révèlent pas systématiquement cohérents avec les idées avancées lors de la concertation : certains habitants ayant réclamé moins de bacs se plaignant finalement d’être parmi les seuls à les entretenir (B13.pdf).

Des espaces mieux gérés par les services techniques

Depuis le début des années 2000, la commune a progressivement réduit son utilisation des produits phytosanitaire, pour atteindre le zéro phyto (2013). Elle a également mis progressivement en place une gestion différenciée des espaces (B3.pdf)

Jusqu’en 2000, nous réalisions une gestion traditionnelle, puis on s’est penché sur la gestion différenciée. (B3.pdf)

Elle a progressivement amélioré ses pratiques et donc les résultats obtenus, même s’il existe encore des marges de progression (B2.pdf, B3.pdf).

La fauche tardive, ça marche bien. On a les effets attendus en termes de gestion (…) On retrouve des terrains propres et fleurit, alors que les premières années c’était plutôt sale, car on avait encore de la matière organique. (B3.pdf)

Les services sont même devenus autonomes dans leurs pratiques (B7.pdf).

Pour toutes les opérations écologiques, les achats de végétaux ou encore la formation des agents, ils ne passent plus forcément par nous, car ils ont compris le fonctionnement. (B7.pdf)

Les indices de contribution de la stratégie de conduite du changement

La liberté d’initiative

Le projet a notamment pu être mis en place avec les habitants sur l’initiative du directeur des services techniques car celui-ci dispose d’une grande liberté d’initiative au sein de la commune (B1.pdf).

J’ai vécu Lens avec des filtres partout et des validations à aller chercher. Ici, vous prenez un post-it, vous l’envoyez au maire, et ça suffit. (B1.pdf)

L’acquisition de compétence sur les méthodes de concertation et les techniques de gestion des espaces

Si le directeur des services techniques a pu mobiliser et animer les groupes de travail avec les habitants, c’est en partie car il avait pu se former sur la thématique et acquérir de connaissances sur les méthodes de concertation (B1.pdf).

Et j’ai eu une réunion sur la démocratie participative, sur comment aborder la population. Il faut partir l’esprit ouvert en ayant travaillé votre projet, sinon vous vous faites chambouler, avec une partie validée et une partie à ouvrir à la démocratie participative. Beaucoup de municipalités partent sur un projet déjà ficelé et le présente. Là, on part sur un projet avec un document, une partie fixe, une feuille de route, mais on laisse du débat et les gens ont le sentiment d’avoir participé. C’est ça la démocratie participative. (B1.pdf)

C’est aussi la formation du responsable des espaces verts, en 2005, qui a permis de revoir l’ensemble des espaces de gestion de la commune (B3.pdf).

En 2005, je suis parti en formation à Grande-Synthe sur la gestion différenciée, car cette ville était en avance là-dessus. Cela a permis de revoir tous nos espaces sur un autre mode de gestion. (B3.pdf)

Grâce à l’antériorité de son implication dans la démarche, la commune a pu progressivement évoluer dans ses pratiques, parfois en expérimentant (B3.pdf, B7.pdf).

A chaque fois, il y a des terrains en fauche tardive un an et si ça ne marche pas, on va plutôt tondre ou planter des prairies fleuries. On teste du mini trèfle en semi sur tous les terrains avec du schiste. On teste un ou 2 espaces par an avec différents produits. (B3.pdf)

L’expertise du CPIE

L’expertise du CPIE permet également à la commune de mener une intervention de meilleure qualité par son appui régulier (B7.pdf). Il appuie notamment la commune en lui apportant des informations sur l’état de la faune ou de la flore, et des conseils sur les modes de gestion des espaces (B2.pdf). La Fredon a quant à elle apporté son expertise sur le plan de désherbage et a appuyé la commune dans la réduction de l’utilisation des produits phytosanitaires (B3.pdf).

Le CPIE nous donne des informations sur l’état de la faune de la flore, la géologie, des préconisations par rapport à telle espèce. Il y a la nidification de ceci ou de cela, donc cette espace doit être traitée de cette manière-là, ou d’une autre manière. (B2.pdf)

On a un rôle de conseiller et Loos traduit (ces conseils) de façon concrète dans la limite de ce qui est faisable. (B7.pdf)

Un nouveau directeur des services techniques

C’est également l’arrivée du nouveau directeur des services techniques qui a permis de changer les pratiques de la commune vers une gestion plus écologique (B4.pdf) .

(Le directeur des services techniques) a fait beaucoup quand il est arrivé. Il a imposé sa “patte” sur le côté écolo. Avant lui, c’était un autre DST, et ce n’était pas un esprit aussi vert. (B4.pdf)

Les autres explications

Les leviers de participation des habitants.

Les participants au projet Coeur de Loos se sont impliqués pour les raisons suivantes :

Selon le directeur des services techniques, ces derniers participent également car cela les touche de pouvoir s’investir et de pouvoir contribuer à la construction du projet (B1.pdf).

Un groupe d’habitants homogène avec les mêmes attentes

Le fait que les participants soient principalement des personnes âgées a pu permettre d’aboutir à certaines décisions partagées car ils avaient les mêmes attentes (B11.pdf).

Il faut vous dire que nous étions quand même tous des personnes d’un certain âge. On avait les mêmes attentes. (B11.pdf)

Une capacité à participer à la décision différente selon les habitants

Les personnes qui ont le plus de temps pour s’investir dans la définition du projet peuvent orienter celui-ci vers leurs propres décisions, au détriment de ceux qui peuvent moins s’impliquer.

D’autres personnes s’impliquent beaucoup plus que moi. Je n’ai pas le temps de m’impliquer 4 heures par jour et ceux qui font le font avec leurs propres idées. (B14.pdf)

Selon l’un des acteurs interrogés, le projet final est finalement moins adapté qu’espéré à leurs besoins, notamment parce que les usagers réels n’auraient pas été suffisamment représentés lors de la concertation. Ainsi, un des retraités mobilisés sur le projet se retrouve à devoir gérer un trop grand espace par rapport à l’implication qu’il souhaiterait avoir dans l’entretien de celui-ci. (B13.pdf)

Pour les bacs, j’avais dit d’en mettre un quart, et si ça marche on en remet l’année prochaine. Ils ont dit : “Non, il en faut plus”. Ce sont des gens qui font pencher la balance mais qui finalement ne sont pas sur le terrain. (B13.pdf)

Le budget limité de la commune

Le budget de la commune est considéré comme limité pour pouvoir agir sur la thématique (B1.pdf, B3.pdf, B6.pdf, B7.pdf). C’est également le cas pour son principal opérateur, le CPIE (C15.pdf, B7.pdf).

Le plus dur c’est le désherbage, après c’est parce que l’on est une commune avec peu de budget, les communes plus riches ou avec plus de personnel y arriveraient peut être plus facilement. (B3.pdf)

Amplification des résultats de l’action publique

Les changements observés

Les habitants

Pour l’opération Cœur de Loos

Une partie de l’entretien de l’espace du Cœur de Loos est assurée par 3 habitants de l’immeuble voisin, tous retraités (B11.pdf, B13.pdf). Un des habitants, également journaliste, participe principalement en prenant des photos du projet (B10.pdf, B13.pdf).

Depuis, je jardine, je prends des haricots, je désherbe les fraises. C’est agréable. (B11.pdf)

Néanmoins, l’implication des habitants au projet est jugée comme faible par l’un des participants et le responsable des espaces verts (B3.pdf, B13.pdf).

Sur Coeur de Loos, on a pas mal de personnes qui devaient nous donner un coup de main et finalement on n’en a pas vraiment. (B3.pdf)

Des jeunes sont venus dégrader l’espace en arrachant et jetant des tomates (B10.pdf, B11.pdf, B13.pdf), et un habitant de la commune a également emporté un pied pour le planter chez lui (B13.pdf).

Une implication inégale pour les autres projets en partenariat avec la commune

Les habitants se sont impliqués sur plusieurs projets avec la commune[11] :

Les gens nous téléphonent et nous disent : “J’ai un nid d’hirondelle venez voir, et je transmets tout au CPIE qui est chargé de faire le suivi de cet indicateur. (B1.pdf)

Pour les habitants, on essaye qu’ils entretiennent, qu’ils désherbent. On faisait du fifty-fifty, mais ça ne marche pas toujours. Au bout d’un moment, ils ne font plus (leurs tâches). Sur les plantations de vivaces, ça marche encore, mais certains commencent à se lasser. (B3.pdf)

Rôle de relais des plus convaincus

Il semble également que les habitants et élus les plus convaincus relaient, à leur tour, le message de la commune pour sensibiliser les autres habitants (B10.pdf) et les faire agir (B6.pdf).

À chaque fois, j’essaye de relayer le message auprès de ma famille, de mes amis. (B10.pdf)

Pour certains, comme l’élu au fleurissement, cette implication est très importante avec des sollicitations directes des habitants ou des investissements financiers personnels.

J’y ai passé des heures, des jours et des jours. Je regarde (les émissions de jardinage à la télé), je téléphone à des gens qui ont des fleurs. Ceux qui ont une belle maison je leur dit : “Regardez telle émission”(…) J’ai environ 300 personnes en contact (…) J’essaye d’expliquer aux gens pourquoi le zéro phyto et ce que fait la ville.

Les agriculteurs et chasseurs mettent en place des actions

Les agriculteurs et les chasseurs ont fait évoluer leurs actions, voire initié de nouvelles actions en partenariat avec la commune. C’est par exemple le cas de l’action “Propreté dans les champs”, de la rénovation des chemins ou du plantage de haies (B1.pdf, B4.pdf, B7.pdf,Site internet de la commune, page “Environnement-Biodiversité”).

Les chasseurs et les agriculteurs travaillent sur l’aménagement de la plaine, à l’intérieur des champs, alors qu’ils sont généralement très attachés au moindre mètre carré de terre. (B1.pdf)

Des agents et services qui font évoluer leurs pratiques

Les agents des services ont effectivement changé leurs pratiques d’entretien des espaces pour appliquer des principes plus écologiques (B2.pdf, B4.pdf, B6.pdf), même si les agents en contrat court ne sont peut être pas aussi “pointilleux”(B4.pdf).

Les équipes précédentes traitaient le bord de chemin. Plus personne, au sein des services techniques de Loos-en-Gohelle, ne pense les pratiques comme cela. (Si vous rencontrez un de nos agents), il ne fait pas de la coupe rase n’importe comment. Ils ont de bonnes pratiques. (B2.pdf)

Les indices de contribution de la stratégie de conduite du changement

Un appui municipal facilitateur

Les services techniques donnent un cadre d’action aux acteurs du territoire dans lequel ils peuvent s’insérer. Ils tentent ainsi de faire “avancer la population dans le domaine public”(B1.pdf, B2.pdf, B3.pdf). Cela peut notamment se faire par une relation donnant-donnant dans le cadre d’un fifty-fifty (B1.pdf).

(Pour la rue Hoche), on demande à la population d’entretenir ces espaces régulièrement. J’ai eu un tiers de la population qui était d’accord d’entretenir un endroit dans le domaine public. C’est rare, il y a en général une barrière franche entre le domaine public et le domaine privé. Il en faut une, mais on essaye de faire avancer la population dans le domaine public, de les faire travailler pour la ville, pour le système. (B1.pdf)

Elle accompagne ainsi largement les actions des chasseurs et des agriculteurs, en leur fournissant par exemple le matériel et les plants nécessaires si ces derniers s’occupent du plantage des haies.

Une double haie a été créée à l’intérieur de leur espace par des volontaires. Nous, nous avons apporté le matériel et les plants. Et j’ai deux agriculteurs qui m’ont dit qu’ils allaient créer une nouvelle haie (B1.pdf).

Enfin, c’est également la commune qui a fourni le terrain nécessaire à la création, puis à l’extension des jardins partagés écologiques (B2.pdf, B8.pdf, B9.pdf).

Une suite logique de l’adhésion à la démarche

C’est en partie parce que certains habitants et élus ont été convaincus par le récit qu’ils continuent à agir ou à relayer la démarche. Ils se servent eux-mêmes de ce récit pour inciter les autres habitants a passer à l’action (B10.pdf).

(Jean-François Caron) m’a non seulement convaincu, mais m’a aussi donné une envie de l’aider à faire des choses. J’essaye d’influencer les gens sur les économies d’énergie. Je leur dit : “Pensez à ce que vous a dit le Maire !”, et les gens y sont sensibles (…) Il donne des pistes et ensuite on le fait naturellement ou on incite les gens à la faire. (B10.pdf)

Des agents formés aux nouvelles pratiques

C’est en partie parce que les agents ont pu se former qu’ils ont ensuite pu mettre en oeuvre les pratiques nécessaires à une gestion plus écologique des espaces (voir les éléments exposés sur l’acquisition de connaissance dans la partie “Changement de posture des acteurs).

Les autres explications

Les motivations individuelles des habitants

Les habitants de Coeur de Loos qui se mobilisent sont principalement motivés par le fait d’avoir une nouvelle activité de jardinage agréable (B11.pdf), ou bien car ils sont en colères car le jardin n’est pas entretenu (B13.pdf).

Pour les habitants impliqués dans des jardins partagés, il semble que leur participation soit principalement guidée par une volonté de cultiver soi-même des produits bons pour leur santé (B8.pdf, B12.pdf). C’est également pour se créer un réseau, faire des économies ou s’échanger des services (B9.pdf, B12.pdf).

C’est d’abord personnel, c’est pour moi que je le fais. Les légumes, c’est pour manger sainement. (B12.pdf)

Des réticences liées à des représentations négatives du zéro phyto (facteur limitatif)

Les premières craintes des agents des services techniques, et les arguments actuels des agents non convaincus, sont essentiellement portées sur la facilité et le rendement des produits phytosanitaires par rapport à une gestion zéro phyto (B3.pdf, B4.pdf). Pour certains, il y avait également une crainte des retours de la population (B3.pdf).

Au départ, je n’étais pas convaincu. J’avais une réticence par rapport à la façon dont je fonctionnais, sur les retours de mécontentement de la population. (B3.pdf)

Des agents aux multiples casquettes

C’est notamment grâce aux multiples casquettes du directeur des services techniques, et à ses relations privilégiées avec les chasseurs et agriculteurs (voir “Les autres raisons” de la partie “Changement de posture des acteurs du territoire”) que certaines actions ont ensuite pu être mises en place avec ces derniers (B1.pdf).

On a mené (la journée propreté) avec (le président du syndicat agricole). C’est moi qui l’ai convaincu (B1.pdf).

Avec les agriculteurs, le maire s’est braqué pendant 10 ans en disant : « vous démolissez les routes, etc. ». Et ensuite, on a construit la rénovation de chemins. Pour cela, j’ai fait trois réunions avec les agriculteurs sans les élus. (B1.pdf)

Des quartiers plus ou moins propices au passage à l’action

Selon plusieurs adhérents des associations de jardins partagés et le responsable des espaces verts, les habitants des quartiers défavorisés sont moins impliqués dans la réalisation d’action propice à la biodiversité (B3.pdf, B8.pdf, B9.pdf). Les actions peuvent rencontrer une plus grande participation auprès des personnes qui sont “loossois depuis longtemps” et qui se connaissent mieux (B3.pdf, B13.pdf).

Ce n’est pas le même type de personne, les quartiers où ça marche bien, ce sont les vieux quartiers. Ce sont des gens qui sont loossois depuis longtemps, ça marche mieux. Ils sont plus impliqués que les nouveaux habitants. Loos-en-Gohelle, c’est fort, tout le monde se connait. (B3.pdf)

Impacts thématiques

Les changements observés

Un environnement attractif, propice à l’émergence de nouveaux projets structurants

L’intervention de la commune sur la thématique de la biodiversité peut également avoir un impact sur la qualité du cadre de vie (B2.pdf,LG_Ville_Pilote.pdf), et ainsi rendre la commune plus attractive (B2.pdf).

Une personne a acheté la maison de ma mère. Il m’a dit : « Je viens à Loos-en-Gohelle car il y a un cadre de vie où je peux courir, voir les oiseaux ». (B2.pdf)

Néanmoins, selon l’un des élus, l’amélioration du cadre de vie ne touche pas de façon égale tous les quartiers (B6.pdf).

Il va falloir que je parle au maire et aux services techniques car ça ne va pas du tout (…) Le Quartier Ouest est triste, malheureux, il n’y a pas une fleur. (B6.pdf)

Meilleure préservation de l’environnement

Les documents produits par la commune sur la thématique semble aboutir à 2 premiers constats :

Les différents acteurs du territoire interrogés semblent également convaincus des impacts de l’intervention de la commune (B1.pdf, B2.pdf, B3.pdf, B7.pdf, B9.pdf, B10.pdf), ou de ses potentiels effets. Il s’agit principalement :

Préserver et améliorer la biodiversité, on a beaucoup plus d’indices que ça marche, avec des comptages qui sont faits là-dessus. Nous, sur le terrain, on en voit aussi beaucoup plus. (B3.pdf)

La commune est également considérée en avance par rapport à d’autres communes (B2.pdf, B3.pdf, B7.pdf, B9.pdf, B10.pdf, B13.pdf).

Il y a le plan zéro phyto, développé depuis 2001. Il y a une démarche qui dure depuis 12 ans mais qui se passe sans problème. Je suis moi-même membre du jury Village Fleuris, et on est bien en avance par rapport aux autres communes. On est bien en avance sur la biodiversité. (B1.pdf)

Un tissu économique dynamisé, notamment autour des éco-activités

Les terrils permettent également au territoire de développer une offre touristique attractive (B1.pdf,Troisieme_fleur.pdf).

(…)les terrils intriguent chaque année plus de 40 000 amoureux de la nature et du sport, hors manifestations particulières. (Troisieme_fleur.pdf)

Un tissu social plus resserré et solidaire

Pour plusieurs participants au projet du Coeur de Loos, un des résultats de l’opération est le meilleur contact que les participants entretiennent entre eux, ou avec les autres habitants (B10.pdf, B11.pdf). Par exemple, après le projet, une inondation est survenue dans les caves de l’immeuble et plusieurs des habitants se sont entraidés (B10.pdf, B11.pdf).

Il y a quelques jours, il y a eu une inondation dans les caves et tout le monde est venu aider (…) Le soir quand il fait chaud, on descend et on discute. (B11.pdf)

Les indices de contribution de la stratégie de conduite du changement

Les retombées de l’implication habitante

C’est parce que les participants ont été impliqués dans le projet qu’ils se connaissent mieux (B10.pdf). C’est également une fois le projet est réalisé que les interactions se développent entre les participants au projet, mais aussi avec les autres habitants (B11.pdf, B13.pdf).

Au bout d’un moment, on s’est assis sur le banc et une autre voisine est venue. On a fait des photos (…) L’autre jour, une dame m’a demandé des explications. Et il y a un couple avec un bébé qui est venu, j’ai pris une fraise et je lui ai donnée. (B11.pdf)

On voit beaucoup de monde qui vient voir (le projet) et c’est agréable. Ce sont des gens que l’on ne voyait jamais et qui viennent. (B13.pdf)

La valorisation du patrimoine minier

C’est notamment parce que la commune fait émerger des atouts issus du patrimoine minier qu’elle peut valoriser une offre touristique (B1.pdf, B7.pdf). Celle-ci a notamment pris la responsabilité d’accueillir du public sur les terrils, ce qui permet leur utilisation à des fins touristiques (B7.pdf).

C’est aussi l’héritage d’être une commune minière, en prenant en compte les multiples atouts (…) Dès le début, Loos-en-Gohelle a transformé ces handicaps en atout. (B7.pdf)

Les autres explications

L’échelle d’action

Même si la commune peut contribuer à la préservation de la biodiversité sur son territoire, les effets attendus sont aussi le résultat d’actions dépassant l’échelle de la commune (B2.pdf, B7.pdf, Recit_2014.pdf).

(…)même si ce n’est pas à l’échelle locale que nous parviendrons à endiguer la disparition des hirondelles. (Recit_2014.pdf)

De plus, il semble y avoir un manque de coordination entre les différentes communes impliqués dans la chaîne des terrils.

Chaque élu veut son activité (…)On pourrait être plus cohérent (sur les corridors écologiques), chaque collectivité à son domaine d’intervention. (C15.pdf)

Essaimage auprès d’autres acteurs

Les changements observés

L’agent référent biodiversité de la ville propose aux autres communes du territoire, rencontrées dans le cadre du concours Villes et Villages Fleuris, de le rencontrer pour leur donner un appui en leur présentant des exemples concrets de ce qui est mis en place à Loos-Gohelle sur la thématique de la biodiversité (B1.pdf).

Comme je suis au jury du concours Villages Fleuris, je donne des exemples concrets aux autres communes, je les invite à me recevoir, à venir me rencontrer dans mon bureau, pour prendre 2 heures ensemble. (B1.pdf)


  1. Site internet de l’Express, “Jean Francois Caron, un vert chez les gueules noires”, juillet 2015.  ↩

  2. Voir Le Plan vert - extraits, en annexe pour plus de détails.  ↩

  3. Voir l’étude de cas sur l’intervention municipale en faveur de l’agriculture.  ↩

  4. Voir la présentation de l’Agence de l’eau Artois Picardie : http://draaf.nord-pas-de-calais.agriculture.gouv.fr/IMG/pdf/8_CROS2014_Agence_de_l_Eau_cle49((a724).pdf).  ↩

  5. Voir en annexe pour plus de détails sur la démarche.  ↩

  6. Voir les entretiens réalisés dans le cadre de l’étude de cas “Participation”.  ↩

  7. Voir les éléments proposé en annexe pour plus de détails sur la démarche.  ↩

  8. Idem.  ↩

  9. Site internet de Loos-en-Gohelle, Espaces Publics de Proximité”.  ↩

  10. Idem.  ↩

  11. Voir les éléments proposés en annexe pour le détail des projets.  ↩